Évaluer une douleur thoracique en consultation est l’une des missions les plus délicates du médecin généraliste. Bien que la grande majorité de ces douleurs soient bénignes, 5 à 15% révèlent une affection nécessitant une intervention urgente (Haute Autorité de Santé, 2021). Il s’agit alors d’orienter le diagnostic sans retarder la prise en charge des cas graves.
Les patients attendent un avis rapide et sûr. Un raisonnement systématique, associé à l’utilisation d’outils validés, garantit efficacité et sécurité. Cette démarche prévient aussi bien l’excès d’examens inutiles qu’un retard délétère de prise en charge.
Des outils comme le score HEART ou le score EDACS, principalement utilisés à l'hôpital, peuvent également guider la stratification du risque en ambulatoire, bien qu'ils n'aient pas été formellement validés en soins primaires (Journal of the American College of Cardiology, 2020).
La présence de l’un de ces signes doit faire suspecter une urgence vitale : SCA, embolie pulmonaire, dissection aortique, tamponnade.
La réalisation d’un examen clinique rigoureux affine le diagnostic.
Étude récente : l’examen physique, centré sur la palpation, permet d’écarter une cause cardiaque dans 90% des cas lorsque la douleur est reproductible, localisée et dépendante des mouvements (BMJ, 2017).
Si le contexte et le matériel le permettent, certains examens de première ligne amènent une aide précieuse :
L’échographie thoracique en cabinet est prometteuse pour identifier des épanchements, pneumothorax, ou fragments de masses parietales (American Journal of Medicine, 2019), mais son interprétation dépend de l’expérience de l'opérateur.
En consultation, face à une douleur thoracique, le raisonnement priorise d'abord les diagnostics à risque vital (triage syndromique), puis affine selon les éléments collectés.
| Cause potentielle | Prévalence (%) | Eléments cliniques distinctifs |
|---|---|---|
| Cause musculosquelettique/paroi | 30-50% | Douleur localisée, reproduction à la palpation, dépend des mouvements |
| Cardiopathie ischémique (SCA) | 5-15% | Douleur constrictive, irradiation, facteurs de risque CV, non influencée par la palpation |
| Embolie pulmonaire | 3-5% | Début brutal, dyspnée, immobilisation ou contexte thrombogène, douleur latéralisée, parfois hémoptysie |
| Affection digestive (RGO, ulcère, pancréatite) | 10-20% | Douleur post-prandiale, brûlures, lien alimentation, parfois éructations |
| Péricardite, dissection aortique, pneumothorax, etc. | <1% | Douleurs intenses, irradiations atypiques, discordance TA, souffle ou frottement, signes d’insuffisance respiratoire |
(Annals of Family Medicine, 2016)
La sécurité du patient commande d’adopter la stratégie de règle de l’urgent, particulièrement si :
En l’absence de suspicion vitale immédiate, la discussion thérapeutique passe par :
Une étude française (SFMG, 2019) a montré que près de 60% des douleurs thoraciques bénignes sont soulagées en moins de 48 heures après simple prise en charge symptomatique et surveillance.
La gestion d’une douleur thoracique en consultation relève d’un équilibre subtil entre intuition clinique formée et utilisation raisonnée des outils. Garder en tête la diversité des causes et la nécessité de sécuriser le patient est le meilleur garant d’une pratique efficace et sûre.