La D-dimère est un produit de la dégradation de la fibrine après activation de la coagulation, réelle “trace” que laisse l’organisme lors de la lyse d’un caillot. Mesurer sa concentration permet d’avoir un outil précieux dans le diagnostic de maladies thrombo-emboliques veineuses (MTEV) telles que la thrombose veineuse profonde (TVP) ou l’embolie pulmonaire (EP). Sa place dans le parcours de soins est aussi stratégique que nuancée.
Le test recherche la présence de fragments de D-dimères circulants via immunoanalyse. Son intérêt : une sensibilité excellente (> 95 % selon la Haute Autorité de Santé) et une valeur prédictive négative élevée, permettant d’exclure la maladie en cas de suspicion faible ou modérée, évitant des investigations plus invasives et coûteuses (ex : angioscanner thoracique) [Réf. : HAS, 2019 ; ESC Guidelines, 2019].
Le test est donc recommandé uniquement en cas de probabilité pré-test faible ou modérée, déterminée par des scores cliniques validés comme le score de Wells (pour TVP ou EP) ou le score de Genève revisité (pour l’EP) [BMJ, 2019].
Les outils cliniques valident la pertinence du dosage. Quelques exemples :
| Score de Wells pour l’EP | Points |
|---|---|
| Signes cliniques de TVP | 3 |
| Embolie pulmonaire plus probable que diagnostics alternatifs | 3 |
| Tachycardie (> 100/min) | 1.5 |
| Immobilisation récente, chirurgie < 4 semaines | 1.5 |
| ATCD d’EP/TVP | 1.5 |
| Hémoptysie | 1 |
| Cancer évolutif | 1 |
Exemple chiffré : en médecine générale, une étude française de 2022 a montré que 70 % des patients adressés pour suspicion d’EP pouvaient éviter un scanner si le score était faible et la D-dimère négative [Le Médecin généraliste, 2022].
Le seuil standard de 500 ng/mL (ELISA) peut sur-diagnostiquer chez les plus de 50 ans du fait de l’augmentation naturelle des D-dimères avec l’âge.
À retenir : un taux normal, chez un patient bien sélectionné, permet d’exclure la maladie dans plus de 97 % des cas et d’éviter jusqu’à 60 % de scanners thoraciques inutiles [ESC Guidelines, 2019].
Selon une étude multicentrique (Woller et al., Chest 2019), l’utilisation inappropriée du test (absence d’estimation clinique préalable) double le nombre de faux positifs et d’iradiations inutiles.
L’amélioration de la concordance entre dosage et interprétation du contexte clinique est un enjeu de formation continue : selon la HAS, en 2022 encore, près de 35 % des prescriptions de D-dimère en ville ne respectaient pas les recommandations, gênant plus qu’elles n’aidaient le diagnostic.
Le dosage des D-dimères est un allié précieux, à condition de bien cerner ses indications et ses limites. Les évolutions diagnostiques à venir incluront peut-être d’autres biomarqueurs pour affiner la spécificité, notamment dans les contextes particuliers (grossesse, onco-hématologie, COVID). Pour le clinicien de première ligne, la clé reste la sélection rigoureuse du patient et l’interprétation dans le contexte clinique adéquat.
Pour approfondir : Recommandations HAS (MTEV) - accès professionnels et ESC Guidelines 2019.